Les Salles Obscures

Le passé éclaire le futur

Le Refuge de François Ozon 4 mars 2010

Histoire sombre et solaire d’une re/construction à deux, nouvelle étape de François Ozon avec Isabelle Carré, Melvil Poupaud et Louis-Ronan Choisy.

Le dernier film de François Ozon s’ouvre sur une scène forte, presque insoutenable : un couple de jeunes drogués – Mousse (Isabelle Carré) et Louis (Melvil Poupaud) – recroquevillés dans un appartement parisien, brulent d’impatience de s’injecter une nouvelle dose d’héroïne. Les images sont violentes, d’un réalisme cru qui nous embarque dans un monde méconnu du grand public mais dont il faut pourtant accepter l’existence, à défaut de pouvoir comprendre les motivations qui poussent deux êtres en pleine jeunesse à consumer leur corps et leurs espoirs pour quelques grammes d’extase mensongère.
Isabelle Carré, méconnaissable avec ses traits tirés, ses joues creuses et son regard absent est la compagne de Louis, un jeune bourgeois paumé qu’un shoot ultime va laisser sur le carreau. Descente aux enfers au dénouement prévisible, la mort a figé au réveil le jeune homme dans une position grotesque, d’autant plus effrayante que c’est sa mère qui le découvre ainsi, convaincue que la chambre de l’appartement cossu qu’elle faisait visiter, était vide. (more…)

 

Vincere de Marco Bellocchio – Pouvoir de la folie et folie du pouvoir 3 mars 2010

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Cinéaste découvert dans les années 70, Marco Bellocchio nous offre un film puissant sur un épisode caché de la vie de Mussolini prouvant que son engagement politique perdure et que sa verve critique ne s’est pas tarie. Un film à voir absolument.

Fragment ignoré d’une relation intime qui épouse sans le savoir le destin d’un peuple, Vincere (vaincre en italien) est l’histoire à peine romancée de la maitresse de Mussolini, du fils jamais reconnu qu’il eut avec elle, d’un amour désespéré pour un homme qui l’instrumentalisa pour tester sur elle son indubitable magnétisme dans ses années de formation politique. Cette femme, aussi belle que fragile, magistralement interprétée par Giovanna Mezzogiorno est une créature vulnérable, qui trouve dans sa soumission à la folie d’un homme une jouissance incomparable. Son aliénation, provoquée autant par la violence d’une passion irrationnelle que par un déséquilibre identitaire, préfigure la démence à venir d’un peuple entier qui trouvera dans la figure de Mussolini, pantin pathétique, de quoi assouvir sa soif de revanche, et fantasmer sur l’hypothétique retour d’une hégémonie qui fit, dans les temps reculés, de l’Italie le berceau indiscuté de la civilisation latine et le foyer crépitant d’une conquête irraisonné du monde. (more…)

 

Euzhan Palcy présente « Rue Cases-Nègres » pour une relecture de circonstance. 28 février 2010

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27 ans après sa sortie, le film d’Euzhan Palcy ressort sur les écrans. Retour sur une aventure cinématographique qui mène obligatoirement à des questions sociétales fortes en ces temps d’identité nationale : la place du noir sur les écrans français et dans la culture métropolitaine.

Lors de la présentation pour la re-sortie de Rue Cases-Nègres, Euzhan Palcy a insisté, afin d’éviter tout malentendu, sur la dimension pédagogique de sa démarche. Il ne s’agit pas, en révélant la réalité des Antilles post-coloniales, de demander des comptes mais bien d’informer le plus grand nombre sur des épisodes ignorés de notre histoire commune, de rétablir certaines vérités historiques, d’entamer un travail long et patient de relecture mémorielle, en insistant davantage sur la responsabilité collective que sur la culpabilité individuelle, tout en pensant l’avenir ensemble dans la ferme intention de soigner les plaies de souvenirs encore vifs par la médecine douce d’un art vulgarisateur mais critique dans son procédé et réfléchi dans ses affirmations. (more…)

 

La Rumeur (The Children’s Hour) de William Wyler 10 février 2010

Sorti fin 61, la Rumeur de William Wyler avec Audrey Hepburn et Shirley MacLaine est un des premiers films hollywoodiens à aborder l’homosexualité féminine.

Heureuse initiative qu’a eue le distributeur Lostfilms de faire découvrir à un public composé d’amateurs et de curieux, un chef-d’œuvre oublié des années 60, La Rumeur de William Wyler, sorti juste après Ben-Hur, le péplum viril aux onze oscars.

Ici, point de muscles saillants et de batailles de chars, Wyler considéré comme l’artisan méticuleux d’un cinéma spectaculaire – drames historiques, comédies musicales ou comédies savoureuses – nous donne une très grande leçon de cinéma dans une œuvre injustement méconnue qui mérite une relecture patiente et dépassionnée tant ses qualités sont nombreuses, et son intérêt sociologique, indéniable.

L’histoire est simple mais l’intrigue savamment élaborée, deux femmes, Karen Wright (Audrey Hepburn) et Martha Dobie (Shirley MacLaine), amies d’enfance, ont travaillé dur pour mettre sur pied leur rêve de jeunesse : une pension pour jeunes filles dans un petit village des Etat-Unis. Tout semble aller pour le mieux jusqu’à ce que l’une des deux institutrices décide d’officialiser sa liaison avec Joe Cardin, le vigoureux médecin du canton, homme joyeux et plein de projets. L’annonce d’un mariage imminent désarçonne Martha qui voit dans cette union la fin de l’amitié fusionnelle qu’elle entretenait jusque là avec Karen, collègue dans le travail autant que confidente. (more…)

 

Le Ruban Blanc de Michael Haneke 16 janvier 2010

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Une société à bout de souffle, terne, sans illusion, sans curiosité, dans laquelle on étouffe, dans laquelle tout est tu, hormis la frénésie de domination d’une caste, qui fait d’une entreprise d’intimidation active son unique objectif – revêtement indispensable pour camoufler la destruction progressive de schémas sociétaux dont le siècle commençant, d’obédience industrielle, entame bien sérieusement la légitimité. Voilà, le miroir que tend Michael Haneke à nos pauvres yeux cherchant inlassablement la distraction désaltérante.

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BRIGHT STAR, un film de JANE CAMPION 12 janvier 2010

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Quel plaisir de clore une décennie outrageusement mercantile par l’évocation d’un destin de poète. C’est l’inattendu privilège que nous offre Jane Campion avec son dernier film, couronnement de six années de patient labeur pour obtenir ce brillant résultat, ce lumineux Bright Star, récit d’un amour impossible entre un poète et sa muse. Cet exercice de style parfaitement dominé nous fait pardonner la rareté de Jane Campion dans l’actualité cinématographique de son temps par la rigueur qu’elle met à peaufiner jusqu’à l’épuisement chacune de ses rafraichissantes créations. (more…)

 

Un Feu Follet d’une impressionnante consistance 1 décembre 2009

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Le Feu Follet, cinquième film de Louis Malle, fait figure encore aujourd’hui, d’objet trouble, diffus, difficilement classable au milieu des autres réalisations de son auteur, et sans parenté aucune avec des œuvres de la même décennie.

La fascination qu’il exerce n’a pas faibli : dialogues superbes, plans d’une beauté presque picturale, jeu parfait, décors splendides et Paris, encore Paris pour quelques années précieuses.

C’est le chef-d’œuvre d’un homme farouchement indépendant, à la curiosité sans bornes et qu’aucune chapelle artistique ou mouvement aux principes réducteurs n’ont pu récupérer, et qui, après de belles réussites dont Les Amants et Un Ascenseur pour l’échafaud, parvient à nous surprendre en puisant dans la littérature un sujet à la mesure de son intelligence. (more…)

 

Jennifer’s Body – Un corps en souffrance 21 octobre 2009

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Megan Fox allume les ados dans un film d’horreur gore réalisé par Karyn Kusama (Girlfight) et écrit par Diablo Cody.

Megan Fox -Jennifers BodyLe titre est assez habile puisqu’il focalise sur le corps de l’héroïne dont on pressent qu’il s’agit de Megan Fox, la nouvelle vamp hollywoodienne. Sorte de Dita von Teese par encore effeuillée mais prête à l’emploi, Megan Fox est, depuis l’adolescence, poursuivie par des rôles de trop belle fille pour être une sainte. Car telle est le sujet de Jennifer’s Body, si sa virginité avait été effective, Jennifer serait morte. Or sa sexualité précoce a ouvert son âme au diable qui s’en est emparé sans sourciller. Avide de sang et de tripes, Jennifer consomme du garçon par vengeance ou par défi. Sa confidente et amie de toujours, interprétée par Amanda Seyfried – seul intérêt du film – tente en vain d’alerter ses proches de la diablerie en cours. Une fin tragique les attend, bien sûr. (more…)

 

La proposition de Sandra Bullock 23 septembre 2009

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Après presque deux ans d’absence, Sandra Bullock nous propose pour son retour une comédie romantique réalisée par Anne Fletcher avec Ryan Reynolds (mari de Scarlett Johansson).

La proposition de Sandra Bullock 2A sortie aux USA, ce film a récolté plus de 33 millions de dollars lors du premier week-end pour atteindre les 160 millions de dollars de recette globale. Score impressionnant lorsqu’on sait que Sandra Bullock n’avait pas tourné depuis plus de 2 ans et que son dernier hit date de 2002 (L’Amour sans préavis / Two Weeks Notice avec Hugh Grant). Il convient d’ajouter que Sandra est devenue une actrice quadra (comme Julia Roberts qui a refusé ce rôle qui lui était initialement destiné) dans un Hollywood de plus en plus friand de jeunettes.

Mais, Sandra Bullock sait, en observant sa filmo que, mis à part Speed, la comédie est le genre qui lui a le mieux réussi en terme d’audience ; et qu’un bon rôle c’est avant tout un personnage bien codifié et aussi reconnaissable qu’un bon cru. Aussi a-t-elle choisi d’incarner celui de la fille sympa et gauche mais – pas dépourvue de sex-appeal – dont on aimerait tomber amoureux. C’est une recette, la recette Bullock qui a été cuisinée à volonté pour des rôles variés (Avocate des grandes causes, Agent du FBI etc.). (more…)